Témoignage de Caroline et son fils Pablo, 11 ans

Caroline Fafchamps est enseignante spécialisée et maman de 4 enfants, dont Pablo. Communiquer n’est pas une mince affaire pour Pablo, qui ne parle pas et a un handicap moteur important. Caroline raconte comment ils ont trouvé des moyens alternatifs pour aider Pablo à communiquer pleinement et exprimer son sens de l’humour et sa vraie compréhension du monde.

Présentez brièvement votre enfant et sa communication actuelle

Pablo est un grand garçon très souriant, curieux de tout, qui aime les fêtes et les concerts. Son caractère nous pousse à chercher des solutions pour qu’il puisse faire le plus de choses possibles. C’est mon moteur et mon formateur.

Pablo est né en 2010 avec une paralysie cérébrale avec atteinte motrice sévère. Il n’a pas de langage oral sauf quelques mots en spontané, et comme il a très peu de mouvements volontaires et ne peut pas pointer ni attraper, il faut s’adapter en continu pour lui permettre de communiquer.  Sa vision avec lunettes est bonne mais il a des troubles de l’organisation du regard, il ne balaye pas et ne peut pas fixer longtemps. Il lui manque aussi les saccades oculaires. Heureusement, Pablo a une très bonne mémoire photographique qui compense ses troubles du regard. Il a également une très bonne mémoire auditive.

Au départ, il a communiqué par des cris, pleurs, hyperextension, mimiques, regards. A l’âge de 5 ans, on a commencé à utiliser un classeur de communication PODD papier. Il y avait 20 pictogrammes sur chaque page, avec un code que nous avons conçu pour lui permettre de désigner son choix de mots par un mouvement de tête ou même avec le nez. Il désignait des couleurs et des chiffres qui correspondaient à l’emplacement des pictogrammes dans la grille. C’était assez laborieux pour lui, mais il arrivait ainsi à parler avec nous.

Ensuite, vers l’âge de 8 ans et en voyant qu’il avait encore plus de choses à nous dire, nous sommes passés sur un classeur PODD papier avec 36 pictos par page, plus un rabat pour faciliter la navigation. Il utilise encore ce classeur, et il désigne son message avec la tête ou le nez, en choisissant la page, la colonne et la case.

En 2019 nous avons introduit l’utilisation d’un logiciel de communication, Snap Core First, avec désignation par défilement. Pablo appuie sur 1 ou 2 contacteurs (des grands boutons reliés à un ordinateur) placés à différents endroits suivant son tonus. Parfois il préfère que l’on positionne ses contacteurs sur les côtés de la tête, ou près de ses mains, sous le coude…. On s’adapte en continu pour lui permettre d’exprimer ce qu’il a à nous dire.

Pour exprimer le oui ou non (ou autre chose), ça varie également :

  • Mouvement de la tête vers le bas avec rassemblement des mains (réflexe archaïque persistant) pour oui, et tête sur le côté pour non
  • Oralement : « oui » ou « iii » et « on » rien signifie autre chose??
  • Pictos placés de chaque côté de sa tête (ou mains du partenaire). Pablo touche sa réponse avec sa tête. Au milieu, une carte blanche pour dire autre chose, ou je ne sais pas.

Qu’est-ce que la communication alternative et augmentée vous apporte dans votre relation avec votre enfant ?

Surtout il y a moins de frustrations pour Pablo, donc l’ambiance est plus détendue. Cela veut dire qu’il a moins de raideurs musculaires, l’accès à la communication améliore son état physique.

Il peut avoir des vraies discussions, où Pablo peut donner son avis et participer plus à la vie familiale. La CAA lui permet aussi d’accéder plus aisément aux jeux de société.

Est-ce que vous pouvez partager une anecdote ou une histoire qui montre l’utilisation de la CAA dans votre quotidien ? 

Pablo me raconte un évènement ou me pose une question auxquels je n’aurais pas pu penser.

Par exemple, il avait demandé un nouveau bébé ou il a raconté qu’il était fâché que la logopède de Julie, à l’école, avait dit qu’elle ne savait pas faire ce que sa logopède en libéral avait noté dans son rapport (ça s’était passé 2 ans avant).

Parfois, ça met mal à l’aise, comme quand il a répondu à une dame âgée qui lui demandait comment il trouvait son chien et qu’il a dit qu’il pue !

Ou qu’il demande à sa marraine qui arrive pour son anniversaire où est mon cadeau avant même de dire bonjour.

Est-ce que vous avez utilisé d’autres outils, méthodes et stratégies avant d’arriver à ce que vous utilisez actuellement ? Lesquels ? Qu’est-ce que cela vous a apporté ?

Oui, surtout en moyen d’accès, ce qui bloque le plus Pablo. On a essayé une licorne maison (un pointeur qui se fixe sur la tête), un laser maison, un bras articulé, un quha zono (une souris que l’on contrôle avec des mouvements de tête), et le balayage assisté par le partenaire ou automatique. C’est-à-dire que l’on lui propose des options dans son outil de communication et il indique le message de son choix.

Qu’est-ce qui vous a le plus aidé sur votre chemin de la communication ? De quoi avez-vous eu besoin ? 

Du soutien et enthousiasme de personnes extérieures.

Des moments où il communique.

Les idées et ressources sur internet et les formations

Et votre enfant, qu’en dit-il : qu’est-ce que la CAA lui apporte ? 

Il avait répondu à une conférence que la CAA, c’est vivre.

Quels conseils donneriez-vous à des parents qui découvrent tout juste la CAA ? 

De ne pas se mettre la pression, de bien s’entourer, d’y croire, mais en accordant du temps (à soi et aux autres, sans pour autant reporter l’implémentation). De prendre du plaisir partagé.

Qu’est-ce que vous voudriez que tous les professionnels sachent concernant la CAA ? 

Qu’ils assimilent bien les mythes de la CAA.

Qu’il faut se lancer, oser.

Qu’une bonne relation avec la famille est importante (dans les 2 sens)

Caroline propose des conseils et des vidéos pour parents et enseignants avec la classe de CAAroline, elle organise des CAAfés papotes pour découvrir la CAA et s’entrainer à l’utiliser à Liège en Belgique et plein d’autres actions au soutien de la communication. Pour plus d’informations, voir son site L’odyssée de Julie et Pablo.

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